Plaidoyer pour la destitution du Général Neva

La troisième et dernière partie de cette série de chroniques concernant « la Déca-dance des Institutions de l’État » au Burundi exposera également et plus en détails les non-dits et les contrevérités concernant la guerre au Sud Kivu, l’instrumentalisation de Red Tabara par le régime DD et la haute trahison présumée commise par le Général Neva à l’égard de la nation burundaise et de l’armée nationale en particulier.

La haute trahison présumée est établie car le commandant en chef des armées burundaises a envoyé les « Wazarundi », ces militaires burundais vendus, à leur gré ou contre leur gré, comme mercenaires à la solde de la RDC. A présent, ces Wazarundi combattent le M23 dans le Nord Kivu sous le drapeau de la RDC et ils portent l’uniforme de l’armée congolaise.

Le Général Neva a aggravé cette présomption de haute trahison car il a déclaré que des Wazarundi prisonniers de guerre du M23 étaient des rebelles de RED Tabara. Ainsi, en les dépouillant de leur identité de militaires réguliers de l’armée burundaise, le Général Neva a privé du coup, les prisonniers de guerre, les militaires burundais tombés sur le champ de bataille et leurs familles, de leurs droits à être assistés et soutenus moralement et financièrement par l’État burundais.

Par contre, plusieurs Wazarundi ont refusé la mission que leur assignait le Général Neva. Ces « Objecteurs de Conscience » sont revenus au Burundi, ont été dépouillés de leurs vêtements pour les humilier, ont été jetés en prison et certains auraient été torturés. Ces « Objecteurs de Conscience » héroïques, seraient environ 250 à attendre un jugement hypothétique. Une raison supplémentaire pour affirmer que le César burundais s’est rendu également coupable de haute trahison à l’égard de ces « Objecteurs de Conscience » et de leurs familles.

Une question cruciale pour l’avenir du Burundi se pose aujourd’hui. Le « temps du miel royal burundais » serait-il pas arrivé pour le Général Neva ? « Le temps du miel empoisonné » que les Biru, les ritualistes dans l’ancien royaume du Burundi, donnaient ordre aux rois de boire quand ceux-ci étaient jugés incapables de gouverner ou étaient accusés de haute trahison. Ce temps serait-il arrivé aussi pour le César burundais ?

Il n’est évidement pas question ici de lui souhaiter la sanction de la peine de mort qu’il promet de rétablir pour les homosexuels burundais. Même s’il est en décadence par le fait du régime DD, l’État de droit demeure un espoir tenace pour les citoyens burundais. Une alternance pacifique devrait donc être imposée par la Justice.

La solution de la mise à mort traditionnelle et rituelle des rois burundais par absorption d’un miel empoisonné est donc à écarter. Sa destitution devrait être organisée dans le cadre de la Constitution du Burundi.
En effet, l’article 117 stipule que :

« Le Président de la République n’est pénalement responsable des actes accomplis dans l’exercice de ses fonctions qu’en cas de haute trahison.

Il y a haute trahison lorsqu’en violation de la Constitution ou de la loi, le Président de la République commet délibérément un acte contraire aux intérêts supérieurs de la Nation qui compromet gravement l’unité nationale, la paix sociale, la justice sociale, le développement du pays ou porte gravement atteinte aux droits de l’homme, à l’intégrité du territoire, à l’indépendance et à la souveraineté nationales.

La haute trahison relève de la compétence de la Haute Cour de Justice.

Le Président de la République ne peut être mis en accusation que par l’Assemblée Nationale et le Sénat réunis en Congrès et statuant, à vote secret, à la majorité des deux-tiers des membres.

L’instruction ne peut être conduite que par une équipe d’au moins trois magistrats du Parquet Général de la République présidée par le Procureur Général de la République.  »

Ainsi, les crimes présumés qui donnent corps à l’accusation de haute trahison du Général Neva pourraient être formulées succinctement comme suit.

1. La vente d’un contingent de militaires burundais comme mercenaires combattant sous le drapeau d’une puissance étrangère et portant l’uniforme de l’armée de cette puissance.

2. Le reniement ensuite de l’identité de ces militaires que le Général Neva considère comme des rebelles de RED Tabara.

3. Le traitement cruel, humiliant et dégradant infligés aux Objecteurs de Conscience.

4. Last but not least, l’appel au renversement de Paul Kagame qui équivaut une déclaration de guerre.

5. La fermeture des frontières partagées par le Burundi et le Rwanda en violation des traités de la Communauté de l’Afrique Orientale et de l’Union africaine.

Toutes ces décisions catastrophiques ont été prises sans consulter l’Assemblée Nationale et le Sénat et sans informer les citoyens burundais sur leur impact dramatique et le risque qu’elles comportent pour l’intégrité de la nation.

Un acte d’accusation formel pour haute trahison devrait donc être introduit d’urgence auprès de la Haute Cour de Justice afin de provoquer la destitution pacifique du Général Neva. Cependant, cette destitution par voie judiciaire semble peu probable. Car le régime DD, depuis les mandats de Pierre Nkurunziza, n’a jamais souhaité instaurer une Haute Cour de Justice prévue pourtant par la Constitution.

En outre, les Parlementaires DD siégeant au Sénat et à l’Assemblée Nationale ressemblent aux jeunes congolais recrutés pour écouter et applaudir la déclaration incendiaire du Général Neva à Kinshasa quand il incitait la jeunesse rwandaise à destituer Paul Kagame.
Les Parlementaires burundais sont des figurants dans un théâtre vaguement démocratique. Ils ne sont préoccupés que par leurs émoluments et les privilèges de leurs fonctions.

La vacance du pouvoir provoquées par l’absorption du miel royal -kwiha ubuki- étant exclus, des négociations qui ne déboucheraient pas sur la destitution immédiate du Général Neva n’auraient aucun sens non plus. Puisqu’il est d’ores et déjà accusé de haute trahison présumée, le maintenir au pouvoir serait lui garantir l’impunité perpétuelle.

Seule sa démission volontaire pourrait permettre des élections anticipées et constituerait la solution de la dernière chance pour organiser une alternance démocratique paisible. Sinon, ce sera malheureusement la voie de la guerre civile qu’il souhaite peut-être.

Cependant, comme il ne pourra pas gagner les trois guerres externes au Sud Kivu, au Nord Kivu et au Rwanda, auxquelles s’ajouterait une résistance active interne pour provoquer l’alternance et la destitution du César, il serait raisonnable qu’il envisage une démission volontaire. Celle-ci pourrait être suivie par des élections anticipées apaisées, transparentes et inclusives qui ne seraient pas gangrenées par la cénilité électorale décrite plus haut.

Seule une réelle alternance démocratique permettra au Burundi de recréer une dynamique de paix, de stabilité et de prospérité. «  I have a dream »….

Athanase Karayenga
isangi10@omail.ai