FocodeMagazine | Burundi : Les Élections de 2025 menacées par impunité , la militarisation et la corruption, alerte l’ONU

À l’approche des élections législatives et municipales de 2025, le Burundi fait face à une accumulation inquiétante de risques, prévient l’ONU. Impunité systémique, militarisation des milices, corruption endémique et répression de l’espace civique créent un climat de tension alarmant. Ces facteurs, combinés à des tensions régionales et une situation socioéconomique précaire, pourraient entraîner une crise politique et sécuritaire majeure, avertit le Rapporteur spécial des Nations Unies.

À l’approche des élections législatives et municipales de 2025, l’ONU tire la sonnette d’alarme sur les risques d’une nouvelle crise au Burundi. Impunité, militarisation des milices, corruption endémique et restriction de l’espace civique créent un climat de tension grandissant. Le Rapporteur spécial des Nations Unies avertit que ces facteurs, combinés à des tensions régionales et une situation socioéconomique précaire, pourraient mener à une grave détérioration des droits humains et à une instabilité politique profonde.

Alors que les élections législatives et municipales de 2025 approchent à grands pas, un climat d’incertitude règne au Burundi. Le dernier rapport du Rapporteur spécial des Nations Unies sur la situation des droits de l’homme dans le pays, s’appuyant sur des éléments historiques et socioéconomiques, met en lumière des facteurs de risque significatifs. Impunité, militarisation des milices, corruption endémique, restriction de l’espace civique et tensions sous-régionales sont autant d’éléments qui pourraient compromettre la stabilité du pays durant ce scrutin crucial.

Impunité systémique : un facteur aggravant de la crise des droits humains

Le Rapporteur spécial a souligné, en référence au Cadre d’analyse des atrocités criminelles, que l’impunité persistante au Burundi constitue un terreau fertile pour la répétition des violations des droits humains. Malgré les appels réitérés pour une justice indépendante et des réformes du secteur judiciaire, aucune autorité liée au régime n’a été tenue responsable des graves atteintes aux droits humains survenues depuis 2015.

L’impunité, selon le rapport, est renforcée par l’inaction de l’appareil judiciaire, qui, loin de protéger les citoyens, tolère et légitime ces abus. Le Service national de renseignement et la milice des Imbonerakure continuent d’agir en toute liberté, intimidant et torturant les dissidents politiques, sous le regard bienveillant des autorités. Ces forces paramilitaires bénéficient d’un soutien institutionnalisé, consolidé par des entraînements réguliers et des slogans d’intimidation, particulièrement en période électorale. Cette situation crée une atmosphère de peur chez les opposants politiques et menace la liberté d’expression.

La militarisation des Imbonerakure : un outil de répression électorale

Le Rapporteur spécial a mis en exergue la militarisation des Imbonerakure, la milice affiliée au parti au pouvoir CNDD-FDD, qui s’intensifie à l’approche des élections. Ces jeunes militants, régulièrement formés dans des camps paramilitaires, sont activement utilisés pour harceler et intimider les opposants. Selon les rapports cités, ils remplacent souvent les forces de sécurité officielles dans certaines régions et bénéficient d’une impunité totale pour leurs actions, qui incluent la torture et les menaces.

En période électorale, la présence de cette milice militarisée crée un climat de terreur. Le Rapporteur spécial note que les chants et slogans utilisés par ces groupes ont un effet direct sur la population civile, exacerbant la peur chez ceux qui s’opposent au pouvoir en place. Cette militarisation inquiétante vise à contrôler l’électorat et à s’assurer de la domination politique du CNDD-FDD, une tendance qui pourrait déstabiliser davantage le pays en 2025.

Corruption généralisée et précarité socioéconomique

Le rapport des Nations Unies insiste sur l’impact négatif de la corruption sur la vie économique et sociale du Burundi. La corruption, qui gangrène les institutions publiques, affaiblit l’état de droit et prive la population des ressources nécessaires à son développement. Le président Évariste Ndayishimiye, en janvier 2023, a publiquement demandé aux personnalités ayant détourné des fonds publics de les restituer discrètement, une déclaration qui, selon le Rapporteur spécial, s’apparente à un aveu d’échec dans la lutte contre ce fléau.

Cette corruption, qui imprègne les plus hautes sphères de l’État, exacerbe les inégalités et la pauvreté, deux facteurs qui, combinés à l’inflation et aux pénuries récurrentes de carburant et de produits de première nécessité, augmentent le risque de conflits sociaux. Le Fonds monétaire international (FMI), dans ses prévisions pour 2024, a averti que les réserves de change du Burundi étaient si basses qu’elles ne permettaient de couvrir que trois semaines d’importations. Cette précarité économique, aggravée par des pénuries chroniques, pourrait accentuer les tensions en 2025, année des élections.

Les restrictions croissantes de l’espace civique : un monopole du pouvoir

Le Rapporteur spécial a également dénoncé le monopole de fait exercé par le CNDD-FDD sur la gestion des affaires publiques. Le principal parti d’opposition est constamment sous pression, et les opposants politiques, les journalistes ainsi que les défenseurs des droits humains font l’objet d’arrestations arbitraires et de répressions violentes. Des rapports récents indiquent que la presse burundaise est muselée, avec des tentatives régulières de contrôler la ligne éditoriale des médias critiques envers le régime.

L’absence de réformes concernant les libertés d’association et de réunion ainsi que l’incapacité de la Commission nationale indépendante des droits de l’homme (CNIDH) à rappeler au gouvernement ses engagements internationaux sont des points de grande préoccupation pour les Nations Unies. Cette restriction de l’espace civique avant les élections municipales et législatives de 2025 augure une atmosphère étouffante pour toute voix dissidente, réduisant encore les chances d’un scrutin transparent et inclusif.

Un contexte sécuritaire volatile : l’ombre de la violence électorale

Le rapport rappelle que la recrudescence des attaques armées menées par des groupes rebelles comme le RED Tabara aggrave le contexte sécuritaire déjà fragile au Burundi. Les incidents récents, dont l’attaque meurtrière du 23 décembre 2023 à la frontière avec la République Démocratique du Congo (RDC), qui a fait 20 morts, illustrent la menace persistante de violence armée.

Face à cette insécurité, le gouvernement burundais a pris des mesures radicales, notamment la fermeture des salles de cinéma et l’interdiction de la consommation de boissons alcoolisées dans les débits de boissons. Cependant, ces actions, qui semblent davantage viser à limiter les rassemblements publics que répondre à la menace armée, ne font qu’exacerber la frustration au sein de la population.

Tensions sous-régionales et risques de conflits transfrontaliers

Le rapport ne manque pas de mentionner l’exacerbation des tensions entre le Burundi et le Rwanda, aggravées par le déploiement de troupes burundaises le long de la frontière avec la RDC et les accusations de soutien aux groupes rebelles. Depuis 2015, le Burundi accuse le Rwanda de fournir un appui logistique aux insurgés du RED Tabara, un groupe rebelle responsable de nombreuses attaques meurtrières sur le sol burundais.

Ces tensions transfrontalières, associées à l’instabilité à l’est de la RDC, font peser une menace sérieuse sur la paix dans la sous-région des Grands Lacs. En 2025, à l’approche des élections, un glissement vers un conflit généralisé est une possibilité que le Rapporteur spécial n’écarte pas, insistant sur la nécessité de dialogue entre les pays voisins pour éviter une escalade de la violence.

Conclusion : une vigilance internationale accrue est nécessaire

Le Rapporteur spécial des Nations Unies appelle à une vigilance internationale accrue alors que le Burundi se dirige vers des élections cruciales en 2025. Sans réformes profondes, notamment dans le domaine de la justice et de la sécurité, le risque d’une détérioration rapide de la situation des droits humains est élevé. La militarisation des Imbonerakure, la corruption endémique et les restrictions croissantes de l’espace civique sont autant de facteurs qui pourraient transformer ces élections en un point de basculement vers une nouvelle crise politique et sécuritaire.